Mike Shatzkin publie aujourd’hui la seconde partie de sa « lettre d’un éditeur à ses auteurs », pour leur parler de ce que sera un « livre numérique enrichi ». Il s’agit d’une lettre fictive, d’un éditeur imaginaire nommé NTP, à ses auteurs. Vous pourrez lire la traduction de la première partie, et en voici la suite :
« 1. Qu’entendons-nous, chez NTP, par « livre enrichi » ?
2. Qu’aurez-vous à faire, vous, en tant qu’auteur, pour nous aider à en créer ?
3. Quel sera notre arrangement ?
Le terme « livre enrichi » désigne quantité de choses, probablement des douzaines, si ce ne sont des centaines, de choses différentes au fil du temps. Le seul exemple auquel on peut se référer actuellement est celui des bonus des DVD : l’offre de contenus additionnels, certains issus des rushes écartés au montage, d’autres du matériel promotionnel (bande annonce par exemple). Il faudra un bon moment pour penser à toutes les choses que nous pouvons faire avec les livres, et encore du temps et des expérimentations pour savoir ce qui pourra vraiment bien marcher. Nous savons que nous avons des outils et il est temps de nous mettre à les utiliser pour accomplir quelque chose d’utile.
Les outils comprennent les liens internes, les liens externes, les vidéos embarquées, du contenu additionnel ( textes et illustrations ) et même des applications logicielles.
Les objectifs ? Séduire plus le lecteur, mieux documenter les livres, promouvoir l’auteur, permettre à l’éditeur ou à l’auteur de promouvoir d’autres auteurs, ou délivrer des contenus additionnels, des produits, des services qui améliorent l’expérience utilisateur des lecteurs.
Les livres numériques en sont encore à leurs balbutiements, et une part de ces premiers efforts constituera à lever les blocages. Une grande partie de ce que nous proposons ici peut être réalisé avec des liens internes. Nous les utiliserons pour rendre les notes de bas de page accessibles de façon transparente dans tous les formats. Comme vous le savez, aujourd’hui elles ne le sont pas. Nous chargerons un dictionnaire lié à chacun des mots du livre (et nous permettrons aux auteurs d’ajouter des entrées comme ils l’entendent, incluant dans le dictionnaire les noms propres qui sont cités dans leur texte).
Les liens externes nécessitent une connexion web. Vous pourriez ajouter des liens vers Wikipedia, vers diverses sources d’information, pour offrir plus de détails sur tel ou tel personne ou événement mentionné dans votre ouvrage. Pour permettre aux lecteurs de se mettre à l’abri des occasions de distraction que peuvent constituer les liens, nous offrirons la possibilité aux lecteurs de désactiver la fonction de colorisation des mots liés. Mais nous sommes convaincus que les lecteurs peuvent tirer un grand bénéfice de ces liens et nous devons les leur fournir dans les livres numériques.
Mais dans un premier temps, il y aura un véritable intérêt à introduire des éléments présents sur le web dans le fichier lui-même, pour avoir plus de contrôle sur les liens et permettre leur fonctionnement en mode déconnecté.
Passer de l’imprimé au numérique permet de fournir en même temps que le texte de la vidéo et de l’audio. Nous savons que beaucoup de nos auteurs ont fait des vidéos, ou ont l’autorisation de disposer d’enregistrements de leurs apparitions télévisées. Nous voulons prendre en compte ce matériel dans la conception de ces livres augmentés.
Nous envisageons de promouvoir nos auteurs auprès de leurs lecteurs avec des biographies plus longues, des images, de la vidéo. Nous savons que les lecteurs sont intéressés par ce que lisent leurs auteurs préférés. Et nous voyons là une opportunité.
Nous ne savons pas ce qu’il en sera de la publicité dans le monde du livre numérique, ou s’il deviendra courant de trouver des revenus supplémentaires via des affiliations, en offrant des liens depuis un livre vers un autre, permettant son achat. Pour l’instant, notre idée est de travailler avec les auteurs qui veulent explorer ses possibilités de revenus, au moins tant que l’industrie n’aura pas encore de pratique établie.
Les livre numériques enrichis auront un dictionnaire interne ; ils contiendront des liens et des contenus issus du web ; ils proposeront des vidéos et de l’audio et des notes à propos d’autres auteurs ; et, dans le cas de certains livres du genre document, ils pourraient contenir des offres d’un revendeur ou d’un autre vendeur, avec plus de détails ou via des liens, qui sont irréalisables dans le cas du livre imprimé.
Prochainement nous devrons détailler ce que vous, auteurs, vous aurez à faire pour rendre vos livres numériques enrichis aussi bon qu’ils peuvent l’être.
(à suivre…) »
Texte inséré initialement sur le blog de Mike Shatzkin dans un billet intitulé « Enhanced Ebooks, Part 2« .
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C’est curieux, ce futur qu’emploie l’éditeur fictif, alors que tous les sites (qui sont à mes yeux une forme nouvelle de livres) offrent déjà ces services.
Mais on se rapproche de plus en plus de ce qu’annonce Bob Stein – « un livre est un lieu ». Thorel soulevait l’autre soir à la BPI, lors de la présentation de l’Histoire du Livre que publie Le Cercle de la Librairie, que le libraire doit travailler sur cette notion du territoire. Pas sûr que Stein et Thorel se rejoignent sur ce point, mais peut-être?
Passé une après-midi fort intéressante (et totalement déraisonnable par rapport à mes obligations) avec Bob Stein, Cory McCloud et quelques clients de Giant Chair. La conception du livre comme place de Bob prend de plus en plus de pertinence.
À Cory McCloud et Giant Chair de communiquer leurs initiatives,
Mais le concept de Bob n’est pas (pour l’instant) assimilable à celui des libraires, en particulier selon la réflexion de Christian Thorel.
Il met à l’heure actuelle en évidence la place de l’appropriation de l’œuvre par ses lecteurs, le rôle social de pratiques de lecture, et, propose à travers CommentPress, des solutions.
Quoique cela ne soit pas sans rapport… On a évoqué le rôle de médiation locale, à propos des librairies, des bibliothèques.
Il est déjà important de faire accepter l’idée que l’œuvre publiée concède des droits à la communauté de ses lecteurs et ne vit que dans son appropriation.
La « stratégie » des liens externes qui transformera le « livre » en espace ouvert sur l’intégralité des ressources du Web pose une question : ses limites matérielles seront donc reculées, mais aussi son ancrage dans le temps. Quel « BAT » sera-t-il possible de signer pour un objet qui, le lendemain peut-être de sa diffusion, contiendra déjà des liens déjà morts? Au-delà, la question d’une possible actualisation permanente de ce livre « ouvert » pourra aussi modifier le rapport économique à l’objet : vendra-t-on demain des livres numériques qui contiendront un algorythme permettant de vérifier que les liens vers des pages Web seront systématiquement/automatiquement vérifiés, éventuellement actualisés ? C’est un peu comme vérifier en temps réel toutes les sources d’une édition savante, sauf que le support de la source, au passage, n’est pas forcément archivé et certainement pas pérenne…
Mike Shatzkin – comme Roger Chartier dès 2005 – repère d’abord les enjeux du numérique qui regarderaient les auteurs; mais comme dit Constance Krebs : les problèmes se posent déjà. C’est ce qui me reste des journées « Demain le livre » ou du colloque du 12 mars au CNAM: pendant les travaux de réflexion, Google continue de numériser. La réglementation viendra plus tard constater (sur le mode « opt out » ?) l’état des pratiques. De la même façon que le format d’un livre de poche est commandé par la circonférence des cylindres des rotatives – et non par l’inspiration esthétique que prétendait avoir eue Massin – je crains que l’enrichissement des fonds éditoriaux soit sévèrement « affluencé » vers Google. Pour des nécessités évidentes d’échanges commerciaux entre les catalogues, privés ou publics. Que peuvent les GiantChair, IGS.cp et autres 4D concept aujourd’hui pour permettre aux auteurs et éditeurs de résister et de profiter de l’intelligence qui se développe, ici -dans les précédentes interventions, j’entends- par exemple?
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