Contrairement à Ngugi Wa Thiong’o, (voir post précédent) Niq Mhlongo écrit en anglais, et assume parfaitement ce choix qu’il a explicité dans son intervention lors du congrès de l’UIE :
« … je n’ai jamais ressenti de terrible trahison ou de sentiment de culpabilité lorsque j’écrivais en anglais. Mais je sentais qu’il était important que j’utilise cette langue d’emprunt pour négocier et naviguer parmi la multiplicité de toutes les autres langues africaines, dans notre pays et ailleurs. Dans un pays multilingue comme l’Afrique du Sud, où nous avons onze langues officielles, je pense que la langue anglaise a été en mesure d’exprimer le poids de mon expérience de Soweto et de Johannesbourg à travers mon écriture et de la partager avec le reste du monde. »
Né dans les années 70, Niq se définit lui-même comme un auteur de la Kwaito Generation, en référence à un mouvement musical et à la sub-culture qui l’accompagnent. Encore tout jeune adulte au moment de la fin de l’apartheid, il est, comme de nombreux sud-africains de sa génération, résolument tourné vers l’avenir et peu enclin à s’attarder sur le passé. La langue anglaise, c’est l’opportunité pour lui de communiquer notamment avec les européens. Son objectif, faire connaitre la réalité mouvante de son pays, faire découvrir sa complexité, sa richesse, en donner une vision contemporaine, montrant les relations entre les gens, et particulièrement entre les jeunes.
Niq raconte comment l’anglais lui a permis notamment, lors d’un déplacement en Espagne à Cartagena, d’échanger avec des lycéens.
« J’ai passé plus d’une heure avec des élèves de lycée, essayant d’expliquer ce que qu’était un township, le kwaito, le tsotsitaal, un robot, un shebeen. Après cette séance, quelques uns sont venus me demander des références de musique kwaito et d’autres livres Sud Africains. J’ai alors réalisé alors que j’avais à la fois partagé ma sous-culture et mon expérience. Ainsi, pour moi, être publié en anglais dans une société multilingue signifie que vous pouvez devenir involontairement un ambassadeur culturel de votre pays dans le monde extérieur.
Selon le recensement de 2001, les langues parlées en Afrique du Sud se répartissent ainsi :
Zulu: 10,67 million, ou 23,8% de la population;
Xhosa: 7,90 million, ou 17,6% ;
Afrikaans: 5,98 million, ou 13,3% ;
Northern Sotho: 4,20 million, ou 9,4% ;
Tswana: 3,67 million, ou 8,2 % ;
English: 3,67 million, ou 8,2% ;
Sotho: 3,55 million, ou 7,9 % ;
Tsonga: 1,99 million, ou 4,4% ;
Swati: 1,19 million, ou 2,7% ;
Venda: 1,02 million, ou 2,3% ;
Ndebele 712 000, ou 1,6%.
Les livres de Niq Mhlongo :
– Dog eat dog
– After tears
Un aussi court voyage ne permet que d’effleurer à peine la réalité d’un pays, dont l’image s’est formée dans mon esprit via quelques lectures de livres et de journaux. La rencontre avec ce jeune auteur me donne envie de creuser, à travers d’autres lectures, cette idée de l’Afrique du Sud, qui s’était figée, finalement, à peine ébauchée, depuis la fin de l’apartheid, il y a presque vingt ans.