Le moment venu de se présenter, lors du rituel tour de présentation qui démarre chaque soirée de la Bouquinosphère, Isabelle disait simplement : Isabelle Aveline, Zazieweb. Et ça suffisait. Aujourd’hui, vérifiez vous-mêmes : Zazieweb s’arrête. Et c’est grande tristesse dans la bouquinosphère et bien au delà. Que dire après Hubert Guillaud, François Bon, remue.net, Olivier Ertzscheid ?
La photo qui illustre ce billet, je l’ai prise à La Rochelle La Roche sur Yon, lors des polyphonies du livre qu’Olivier avait organisées avec ses étudiants sur le thème des « nouvelles recommandations ».
Les nouvelles recommandations, elles étaient là, sous notre nez : un réseau social, un vrai, de lecteurs francophones qui échangeaient, partageaient, commentaient, discutaient, depuis des années, bien avant l’arrivée du web 2.0, bien avant que l’on commence à parler de la nécessité pour les éditeurs de devenir des » animateurs de communautés », bien avant que l’on dise et répète à l’envi qu’avec le web, le lecteur était enfin accessible, que le lecteur était au centre.
Isabelle, dans la page qui accueille aujourd’hui le visiteur sur Zazieweb, explique les raisons de l’arrêt. Après avoir raconté ses efforts vains pour trouver un soutien institutionnel (pourtant, à un moment, on y a cru…) , elle ajoute :
« Parce que j’ai un peu/beaucoup l’impression de servir de « test » aux institutions et pools de recherche qui, dans quelques mois/années, auront les moyens ou la compréhension des enjeux… parce que « assez » de voir des projets institutionnels ou des programme de recherche financés sans qu’il y ait de véritable usage, de public utilisateur…, « assez » d’entendre des assises du Livre conclure sur la perte de vitesse de la chaîne du livre et sur la nécessité d’encourager de nouvelles formes de médiation du livre sans que cela s’accompagne de véritables mesures ou prise de position, « assez » d’entendre toujours les mêmes Cassandre/éléphants alors que la « base » innove au quotidien sur des blogs ou sites persos, alors que les lecteurs et process d’appropriation se déplacent sur d’autres supports (web, podcast, flux rss, mobiles…), parce que décidément il ne semble pas que l’intelligence du média web soit comprise et intégrée dans les politiques culturelles et les instances étatiques et du coup en reste à la puissance des acteurs du privés et souvent, de surcroît, anglo-saxons, et ce alors — paradoxe suprême & vain — qu’il semble de bon ton de le déplorer… » (C’est moi qu souligne)
L’intelligence du web, la compréhension fine de ce dont il s’agit et de ce qui s’y passe : Isabelle la possède, non seulement de manière abstraite, mais aussi parce qu’elle la vit, la met en pratique et la partage avec autrui depuis des années. Cette intelligence, encore trop rare, c’est ce qui fait qu’on est certains de continuer de rencontrer Isabelle sur les chemins électriques de la littérature.
Si 10% des inscrits acceptaient d’investir annuellement l’équivalent de trois places de cinéma (moins de six heures de loisir culturel) ou une place de concert (trois heures de spectacle vivant) et dégageaient un chiffre d’affaire annuel de l’ordre de 50 000€ ?
Réclamer une politique culturelle intelligente passe à mon avis aussi par des manifestations volontaires des contribuables/électeurs.
Alain, le coup des « si seulement 10% des inscrits donnaient un peu… » ne marche pas.
C’est comme en écologie quand on dit « si chacun changeait ses comportements … »
Dans tout les cas il s’agit de ne pas compter sur la puissance publique et ce n’est pas acceptable, même si tout ne vient pas d’elle. Et là, en l’occurrence, ZazieWeb demandait des relais : le gros du travail et la notoriété avait déjà été fait et atteint comme l’indiquent les stats.
@Christian
Le fait est que travail, notoriété, demandes de relais ne suffisent régulièrement pas à emporter la décision politique (ou industrielle). Il ne s’agit pas de souhaiter un changement de comportement massif, mais de manifester publiquement une volonté d’affectation de ressources.
Du point de vue de la puissance publique, le succès de Zazieweb, fondé sur la gratuité pour tous, n’aide pas à évaluer les arbitrages d’affectation de budget autrement qu’entre projets ‘gratuits’, pas plus que le succès de la distribution de fraises Tagada lors de certaine université d’été n’est la garantie d’un choix d’investissement en fonction d’une proportion significative de la population concernée…
C’était pas à La Rochelle mais à La Roche sur Yon, Virginie. Moi qui rentrait de Quiberon après un week-end merveilleux sous le soleil, apprendre cela, une semaine qui démarre décidément bien tristement…
Ping : Irène Delse » Si tu survis à ton éditeur…
Bonjour ! je débarque ! pratiquement de la lune ! Pourquoi ne pas faire un site avec abonnement payant ? pas besoin d’avoir de gros revenus, personnellement je serais prête à donner 30 euros par an, est ce assez ? je ne connais pas les fréquentations du site ?????